Le Mont citoyen

Démocratie – Solidarité – Écologie


RIE III : 3 bonnes raisons de la refuser

Economiste de formation, j’ai passé la majorité de ma vie professionnelle à développer les affaires d’entreprises privées diverses et à défendre des idées libérales. J’essaye d’avoir un regard critique objectif sur l’activité politique, sans dogmatisme de parti.

Dans le cas de la RIE III, je veux crier haut et fort : « Arrêtez de vous laisser berner par les lobbys économiques ». Presque tout le monde répète en cœur la même chose : « Oui, pour sauvegarder les emplois ». Sans se poser les vrais questions de fond. Certains éléments sont à saluer, dont en particulier l’objectif initial d’abolir les 2 poids 2 mesures du système fiscal actuel. Mais ce paquet final est profondément en défaveur d’une souveraineté financière sereine des collectivités publiques et de l’intérêt collectif de l’ensemble de la population, au final.

Voici donc à mon avis 3 bonnes raisons de refuser ce projet le 12 février.

  • Quel taux est raisonnable pour tous?

Harmoniser le taux pour l’ensemble des sociétés, c’est bien. Mais laisser à chacun des 26 Cantons la liberté de fixer leur propre taux ne fait qu’exacerber la concurrence fiscale déjà largement problématique, autant au niveau suisse qu’au niveau international. Le Canton de Vaud a déjà fixé un taux en-dessous de 14%. C’est très bas, beaucoup trop bas à mon avis. Et cela donne le pas pour les autres cantons… Pourquoi le taux d’imposition des personnes morales devrait-il être 2 à 3 fois inférieur (voire plus à cause du point 2) à celui de nombreuses personnes physiques, salariées ou même à leur propre compte? Est-ce cela, l’équité fiscale?

  • Des astuces à tout va pour réduire encore plus sa contribution fiscale.

L’objectif initial et souhaitable était un taux d’imposition unique, stable, transparent. Au final, au vu de tous les mécanismes de déductions possibles, non seulement les recettes fiscales risquent d’être vidées de leur substance, mais en plus impossible de prévoir dans quelle ampleur. Le double-spectre d’un démantèlement des services publics et d’une hausse des impôts pour les personnes physiques est une réalité, afin de compenser les pertes fiscales générées à moyen terme. Or il n’y a pas vraiment d’autre lobby pour défendre les contribuables citoyens que les milieux politiques d’extrême gauche, dont je ne partage souvent pas le dogmatisme.

A noter en plus que ce sont encore les entreprises les plus profitables qui bénéficieront du système, et non pas les petites et moyennes entreprises, qui elles ont d’autres problèmes (par ex. l’accès à des financements), pas du tout adressés dans la réforme.

  • Un engrenage mondial à l’opposé d’un développement soutenable

On nous parle de compétitivité de la Suisse dans le monde. La Suisse est déjà un des pays qui se porte le mieux de très loin. Or cette course mondiale effrénée à compétitivité et à la croissance infinie nous mène droit dans le mur. Ce système n’est pas soutenable. Et c’est enfin reconnu par le plus grand nombre. La Suisse, par sa situation privilégiée, devrait donner l’exemple, sans naïveté mais avec plus de courage. Or la RIE III propose l’inverse. Ce projet ne fait que mettre de l’huile sur le feu dans la guerre économique mondiale, et accélère le cercle vicieux dans lequel nous sommes tous plongés.

C’est pourquoi je dis stop, je dis non, et je vous invite le 12 février à refuser ce paquet fiscal tel quel.

Arnaud BRULÉ